Rohingyas, une minorité sans voix Bruno Amsellem
En Birmanie, les Rohingyas font partie des minorités les plus persécutées de la planète d’après l’ONU.
Depuis juin 2012, les exactions commises à l’encontre de cette minorité musulmane, apatride sur son propre sol, se sont multipliées. Les populations cèdent aux appels à la violence propagés par certains dignitaires bouddhistes à travers le pays.
Les autorités birmanes, accusées par plusieurs ONG de nettoyage ethnique, imposent de fortes restrictions à la présence d’étrangers et au travail des humanitaires dans la région de Sittwe, capitale de l’Arakan, au nord-ouest du Myanmar.
Dans la ville et ses environs, près d’un millier d’habitations, ainsi que des mosquées, ont été détruites ou incendiées. A la suite de ces épisodes de violence, plus de 140 000 personnes ont dû fuir et vivent désormais enfermées dans des camps de déplacés.
Privées de liberté de circulation, les familles s’entassent dans des baraquements de fortune de ces zones qui s’étendent à perte de vue, strictement gardées par l’armée.
Dans l’unique dispensaire en fonction pour l’ensemble des camps, les patients ne reçoivent pas de traitement, à l’instar des femmes allongées à même les sommiers dans la salle qui leur est réservée. Nombre d’entre elles, souvent atteintes d’hépatite, décèdent en cours de grossesse ou à la suite de leur accouchement.
Entre les difficultés à se procurer de la nourriture et des conditions sanitaires déplorables, la mortalité a explosé, en particulier chez les femmes et les enfants.
Comme les soins, l’éducation est quasiment absente pour les populations : on compte à peine une dizaine d’écoles de fortune pour l’ensemble des déplacés.
Au détour des chemins de terre de l’un de ces camps, la principale école accueille près de 2600 enfants. Chaque classe compte une centaine d’élèves. Les professeurs appartenant à la majorité bouddhiste ont déserté les écoles fréquentées par les Rohingyas.
Les professeurs bénévoles, pour la plupart des étudiants contraints d’interrompre leur cursus après les émeutes, tiennent à enseigner afin de ne pas laisser les enfants livrés à eux-mêmes et sans avenir.
A Meiktila, au centre du pays, la ville porte les traces des violences de mars 2013, comme dans le quartier de Mingala Zayone, où une quarantaine de personnes se sont retrouvées prises au piège des lynchages devant une école, sous l’œil passif des forces de l’ordre. Un bus scolaire a été ravagé par les flammes, la plupart des victimes étaient âgées de 12 à 15 ans. Comme dans l’Arakan, la population musulmane vit désormais enfermée dans des camps, à l’abri des regards, comme dans celui de Yin Daw.
Le 28 février 2014, le pouvoir central a encore interdit à Médecins sans Frontières de poursuivre ses activités dans cet Etat, accusant l’ONG de cacher des « Bengalis », le nom utilisé par les Birmans pour désigner les Rohingyas.
Un mois plus tard, toutes les organisations humanitaires ont dû évacuer leur personnel de Sittwe, à la suite de nouvelles attaques.
petite bio :
Bruno Amsellem débute une carrière de photographe de presse en 1997 pour l’hebdomadaire Lyon Capitale. Il travaille en France et se rend régulièrement à l’étranger. Visa pour l’image projette “Les enfants du Noma” en 2006, “Zabbalines, les chiffonniers du Caire” en 2012 et expose “Rohingyas, une minorité sans voix” en 2014. Il expose son travail sur l’élection présidentielle au Mois de l’image à Ho Chi Minh-Ville, au Vietnam, en 2007. Le Centre d’histoire de la résistance et de la déportation de Lyon expose “Voyages
pendulaires”, un reportage sur les migrations des Roms entre la France et la Roumanie
en 2010. Par ailleurs, ses reportages au Caire, en Roumanie, au Pakistan, en Birmanie et en Inde font l’objet de parutions dans la presse nationale et internationale.
Basé à Lyon, il travaille pour la presse quotidienne et les magazines.
son site : http://www.brunoamsellem.photoshelter.com